Les émissions s’enchaînent et la lente asphyxie de C8 se poursuit avec une remarquable continuité… Si chacun sait que la santé de la chaîne va en se dégradant, la direction des programmes ne semble pas décidée à changer de fournisseur. C’est ainsi qu’elle continue de compter sur les services d’H2o, la société de production de Cyril Hanouna, pour tenter de se refaire la cerise. C’est à ce titre que, le jeudi 26 septembre, à 23H30, apparût « DE QUOI J’ME MÊLE ». Sur « MyCanal.fr », le concept est décrit en ces termes : « Dans cette nouvelle émission, Eric Naulleau, entouré de chroniqueurs, recevra chaque semaine 3 invités aux parcours et aux histoires différentes ». Lumineux. Nous n’avions jamais vu pareille audace en télé ! L’occasion pour Le Téléspectateur de regarder cette démonstration de génie. Et très vite, le moment passé devant l’écran s’est transformé en (très) mauvaise soirée… DECRYPTAGE.
Alors que la révolution numérique oblige les professionnels de l’audiovisuel à tout repenser en termes de formats et de contenus, H2o nous propose « DE QUOI J’ME MÊLE », un talk-show reposant sur un dispositif qui a vécu : des chroniqueurs et des invités placés de part et d’autre d’un plateau télé, pour parler d’actualité. Le tout arbitré par un animateur. Du génie à l’état brut. Mais la production allait rapidement nous prouver qu’elle en avait encore sous le pied. Dans ce rôle de « chroniqueur », toujours abusivement attribué, figuraient de vraies têtes d’affiches : Sophie Coste, l’inconnue au bataillon présentée comme « Animatrice et Journaliste », Thierry Cheze, « Rédacteur en Chef de Première », mais aussi et surtout la dépouille d’Énora Malagré, revenue de parmi les morts. À noter que compter sur une Énora Malagré pour bavarder culture est un pari sacrément acrobatique, sinon couillu. Dans tous les cas, pari perdu.
Énora Malagré, c’est un peu le naufrage de la matière. Dans ses grands yeux se lit toute l’inconsistance du monde. Les mots qui sortent de sa bouche ne font planer aucun doute sur le périmètre extrêmement balisé de ses connaissances. Mais heureusement pour elle, il existe une solution pour masquer les lacunes : faire illusion. De ce point de vue, la chroniqueuse maîtrise tous les artifices. Chez elle, tout n’est que posture physique, manières, chichis, exagérations, apparence et grandiloquence. De l’esbroufe et de l’enfumage à tous les niveaux, qui ne tromperont que C8 et H2o.
Avec une telle brochette de seconds couteaux, que nous était-il permis d’espérer ? Rien, hors mis d’observer les yeux grands ouverts la fabrication de conversations qui nous abaissent.
DES INVITÉS… INATTENDUS…
Côté invités, le chargé de programmation a fait fort, très fort même. Car apparemment, rien n’était plus urgent que d’accueillir Rocco Siffredi, Dave et Sylvie Testud pour étendre la visibilité de l’émission et papoter d’actualité culturelle. Au programme, Kamasoutra, chansons et théâtre. Le Téléspectateur tiendra le coup jusqu’au bout.
UN TALK SHOW DONT ON A DÉJÀ ENTENDU LE REFRAIN…
Dès les premières secondes, Eric Naulleau pose le décor : « Bienvenue dans l’émission qui mélange les genres pour débattre en toute liberté avec celles et ceux qui font l’actualité ». Autrement dit, « Bienvenue dans tu l’as déjà-vu et revu ». Putain, Eric, dans quoi es-tu allé te fourrer ? Pas l’ombre d’une rubrique ne viendra donner du souffle à l’émission. Nous étions dans « ONPC », en version encore plus ringarde. Il fallait le faire…
Hors mis la peine que nous éprouvons pour Eric Naulleau, cette émission est très significative des activités d’H2o, en ce sens qu’elle offre à chacun une nouvelle occasion de mesurer l’incapacité de cette boîte à proposer des concepts innovants. Dans le petit monde de la télévision, voir une telle émission passer l’étape de la diffusion alors qu’elle ne présente pas l’ombre d’une idée nouvelle, relève de l’exploit. Alors, comment une boîte dont la nullité des concepts est à ce point avérée peut-elle continuer à répandre si abondamment son flot de créations dites « originales » sur C8 ? La réponse est simple : en 2015, Vincent Bolloré (propriétaire du Groupe Canal) signe un chèque de 250 millions d’euros sur cinq ans pour s’assurer les services de Cyril Hanouna, l’animateur-producteur, jusqu’en 2021. Il faut donc honorer le contrat, et produire toujours plus, pour remplir les cases de la grille de C8. H2o Production, qui a récemment été rachetée à 100% par Banijay Group, est donc loin d’avoir finie d’inonder C8 de ses bouses audiovisuelles.
Au regard du rendu de « DE QUOI J’ME MÊLE » (mais aussi de « LA GRANDE DARKA », diffusée le samedi après midi sur C8), il convient de s’interroger très sérieusement sur les capacités créatives de ceux qui occupent les fonctions chargées de penser ces émissions… Nul doute que des ajustements viendront caler l’ensemble. Mais n’espérons pas trop : c’est mal barré. Des prémisses du premier numéro de ces talk-shows s’ensuivront des conséquences inévitables : une baisse des audiences. Et rien ne parviendra à compenser l’aggravation continue de cette érosion. Car ce qui saute aux yeux désormais, c’est que l’équipe créative à l’origine de ces émissions est mauvaise, de A à Z…